Archive de l’étiquette préservation

Des nouvelles fraiches de Nouvelle Zélande

Syrinx n°12 – Mars 2019

Alors que le CODA s’apprête à renouveler l’adoption de Kuïa pour la 5ème fois, les rangers du Kakapo Recovery nous ont adressé leurs dernières nouvelles.

Nau mai, haere mai, Club Ornithologique Drôme-Ardèche.

Une saison des amours précoce et tumultueuse.

On le sait maintenant, le programme de conservation initié par Richard Henry en 1894 commence à donner des résultats, puisque la population de Kakapos augmente de manière significative.

Si bien que ces non-volatiles commencent à être à l’étroit. En ont résulté une tragédie et des désagréments.

Nous déplorons la perte de Piripi, dont nous avons retrouvé le corps sans vie sur Anchor Island. Piripi était un mâle reproducteur, il est mort des suites d’une bagarre, sans doute territoriale, probablement contre Ngatapa, un autre mâle qui présente également des blessures. Cette disparition porte à 147 le nombre de Kakapo adultes au début de la période nuptiale. Période troublée également par la présence de jeunes mâles pas encore en âge de se reproduire, qui sont venus déranger quelques nids. Afin de favoriser les chances, quelques transferts ont été opérés entre plusieurs sites, tout en consacrant l’un d’entre eux aux représentants de l’espèce qui ne sont pas encore fertiles. Malgré tout la saison s’annonce déjà comme exceptionnelle, commencée par la ponte du 1er œuf dès le 18 décembre (un record). Nous recensons aujourd’hui 189 œufs pondus et 37 poussins en bonne santé.

A la quête du Kakapo perdu

Atareta dans son nid – Photo Brodie Philp

Grâce aux chiens nous sommes parvenus à retrouver Félix et Boss sur Whenua Hou. Quant à la jeune Ninihi, elle a été retrouvée par hasard sur Anchor par un membre du personnel, à la recherche de son téléphone égaré. Ces disparitions sont peu courantes et sont l’effet de défaillances des émetteurs placés sur les oiseaux.

Toutes les chances de leur côté

Tableau des nids

Étant donné la précocité de la saison des amours, nous avons mis l’accent sur l’incubation artificielle, en prélevant une grande quantité d’œufs dans les nids. Pour les femelles les moins compétentes à élever les petits, nous avons placé des œufs factices, Pour les autres nous avons fermé les nids. La conception d’un nouveau nid stimule les femelles pour la reproduction. Ce qui pourrait permettre une seconde vague de ponte. Tout cela semble bien fonctionner pour le moment puisqu’on a pu constater que les femelles reprenaient le chemin des sites d’accouplement, pendant que les premiers poussins naissent dans les labos. D’autant que l’année est sous le signe de l’abondance en ce qui concerne le rimu (le fruit dont les kakapos sont extrêmement friands).

Kuïa quant à elle a pondu 4 œufs qui se sont révélés infertiles, mais Trois petits ont déjà éclos d’une deuxième ponte.

Soutien technique

Oeuf intelligent – Photo Stu Cockburn

Cette année encore, nous déployons un grand renfort de moyens, notamment dans le domaine de la localisation, de l’observation, et du prélèvement d’échantillons. En amont de la période de reproduction nous avons placé 37 transmetteurs GPS sur la population de Whenua Hou, plus précisément sur 18 mâles et 19 femelles en âge de se reproduire. Nous sommes plus que jamais témoins de leurs allées et venues, leurs interactions, leur capacité à élever… Plusieurs nids disposent également de capteurs à l’entrée et des caméras dissimulées dans des œufs factices nous transmettent des images en direct.

Sinbad et le Drone – Photo Andrew Digby

Mais la grande avancée, c’est l’utilisation de drones. Ils ont montré leur efficacité dans le transfert d’échantillons de semence ou d’œufs à incuber. Là où il fallait auparavant plusieurs heures les prélèvements rallient le laboratoire en une 10aine de minutes. Un temps gagné indéniable sur le transport, mais il faut également prendre en compte une meilleure réussite des prélèvements. Ces données nous ont également permis de déployer la nouvelle base de données, capable d’accueillir beaucoup plus de détails et se focalise également sur le recueil des informations en rapport avec la saison de reproduction.

Et le moral

Il est bon. Sirocco vient de revenir de sa tournée à l’Orokonui Ecosanctuary où il a rencontré 1500 admirateurs et a pu les sensibiliser sur le sort de l’espèce. Il a regagné son territoire où il va entamer des vacances d’une durée d’au moins 2 ans. Par ailleurs, notre équipe est renforcée par des volontaires, venant nous prêter main forte pour l’été (hémisphère sud).

Komaru qui était parti se faire soigner de son cloacitis au Zoo d’Auckland, est revenu en bonne santé et a repris son poids de forme. Il a pu reprendre ses activités très vite, se jetant à corps perdu dans son violon d’Ingres : compter fleurette. En effet depuis son retour se sont plusieurs femelles qui sont tombées sous son charme.

Notre partenaire Meridian qui nous a permis le financement des œufs intelligents et nous assure le bon fonctionnement du matériel électrique, a lancé une campagne de recrutement particulière. Il s’agit de trouver un saxophoniste inspiré pour stimuler la libido des oiseaux. Ce qui donne une ambiance particulière aux montagnes environnantes.

L’année prochaine on suspendra des boules à facettes !

https://www.facebook.com/docgovtnz/videos/849943385397524/

 

Un cadeau pour nos mécènes.

Vous pouvez visiter le sanctuaire des Kakapos, nous avons mis en place une visite guidée des territoires. Vous pouvez explorer à votre guise, peut-être y ferez vous de belles rencontres. Cette visite est disponible par le lien ci-dessous. Pour profiter de cette expérience, vous devez installer Google Earth (Installer) ou utiliser le navigateur chrome.

Rendre visite aux Kakapos

 

La saison des amours des Kakapos va commencer

Syrinx n°9 – Décembre 2018

Dans quelques semaines, et durant toute la saison, la nuit retentiront les appels des mâles à travers les vallées des îles sanctuaires des Kakapos.

C’est une ambiance qui m’inspire les brames dans nos forêts et que je rêve avoir l’occasion de comparer.

https://www.facebook.com/lucia.machado.7528/videos/1720601558009168/

C’est aussi l’occasion de reprendre contact avec les rangers du Kakapo recovery, en particulier Bronwyn Jeynes qui répond toujours à mes questions.

Kia ora Club Ornithologique Drôme-Ardèche, nous sommes navrés pour votre longue attente afin d’avoir des nouvelles des Kakapos, mais à notre décharge beaucoup de péripéties ont rendu la vie au sein de l’équipe quelque peu mouvementée.

Je me suis laissé dire que tous les indicateurs sont au “vert” pour la saison de reproduction, cette année.

C’est exact, Nous prévoyons une saison de reproduction énorme, peut-être dans les trois îles, cet été (Nota : L’été dans l’hémisphère sud commence le 21 décembre). Nous sommes donc en train de planifier et de recruter pour cela. Notre équipe double en nombre durant la saison de reproduction et plusieurs centaines de personnes : volontaires, vétérinaires, équipes de cinéastes et divers spécialistes franchissent nos portes pour nous encourager. La reproduction va réellement commencer début janvier alors prenez bien la précaution de nous suivre sur nos réseaux sociaux (Facebook) et de vous être inscrit à notre newsletter, vous restez ainsi informé des dernière nouvelles au fur et à mesure des événements ! Nous avons très récemment entrepris l’escalade printanière sur Whenua Hou et et avons pu constater que 40% des arbres avaient fructifié ! (Nota : Ce qui est une condition primordiale pour la réussite de la saison de reproduction).

Cette excellente nouvelle ne poserait-elle pas de nouveaux objectifs à l’équipe présente ? Le mâle a besoin d’un territoire spacieux et votre territoire propice est plutôt limité.

À l’issue de la saison nous aurons à réfléchir sérieusement sur l’expansion géographique du Kakapo. Comme la population augmente continuellement nous sommes confrontés au challenge de leur trouver de nouveaux territoires propices, et aussi de prendre les décisions nécessaires pour adapter les efforts à faire pour prendre soin d’une population toujours plus grande.

Quelles sont les actualités notables de cette année ?

En septembre 1600 personnes sont venues visiter Sirocco alors qu’il était présenté à l’éco-sanctuaire d’Orokonui. C’était vraiment impressionnant de rencontrer autant de gens enthousiastes et de faire partie de l’incroyable expérience de voir un Kakapo en chair et en os.
Nous avons également des tonnes de nouvelles technologies, notamment une toute nouvelle base de données en préparation. Celles-ci nous permettront, grâce à un meilleur outil de gestion, de recueillir et d’exploiter plus facilement toutes les observations, nous pourrons ainsi mieux comprendre l’activité des oiseaux durant la saison de reproduction avec une précision sans précédent.
Nous avons également installé des émetteurs GPS à un grand nombre de mâles afin de pouvoir suivre leurs mouvements pendant la préparation de leurs réseaux de sentiers, de leurs cuvettes, et établir leurs territoires en vue des accouplements à venir.
A ce jour nous avons complété le séquencement des génomes de 169 spécimens. Il en résultera des recherches sur les causes potentielles et le traitement de la cloacite (Nota : maladie du “cul croustillant” que nous avons évoqué dans cet article), ainsi que la relation entre les Kakapo et le rimu.

En matière de couverture médiatique vous avez mis les petits plats dans les grands…

Oui, nous espérons que vous avez apprécié notre collaboration avec Sir David Attenborough, le réalisateur Scott Mouat (retrouvez son film en bas de cet article) et l’équipe qui a donné notre Google Voyager Story (disponible sur Google Earth). L’écrivaine Alison Ballance a entièrement révisé son fameux et fantastique livre sur les Kakapos, nous avons ouvert notre nouveau site internet, et vous pouvez désormais nous retrouver sur Instagram !

Avez-vous un état de santé de chacun de vos protégés ?

Nous avons récemment terminé notre revue annuelle des spécimens, par un bilan santé individuel et le remplacement de leur transmetteur, qui impose de les capturer tous, un par un. Nous avons trouvé deux cas bénins de cloacitis et déplorons le décès de Jane. Nous avons toujours pensé que Jane était la doyenne du groupe, qui avait été baptisée par Douglas Adams. Pour le reste il semble que la population soit en excellente santé, une bonne quantité présentant des signes de prise de poids significative laissant indiquer qu’ils se préparent à l’accouplement cet été.

Kuia dans son terrier [photo : ranger Brodie]

Des nouvelles de Kuïa ?

Nous avons trouvé Kuia dans un terrier sous des racines d’arbres sur une pente douce et moussue. Une entrée étroite menait à une chambre creuse ouverte. Elle était sur le côté, hors de l’eau et de la boue qui étaient sur le sol. Elle s’assit simplement et regarda le garde forestier Brodie monter et prendre quelques photos d’elle. Elle est restée calme jusqu’à ce que Brodie s’en saisisse. Le seul cri qu’elle fit pendant toute la procédure fut quand on l’a sortie de son terrier. Elle était extrêmement calme et s’est laissée manipuler. Nous avons pu lui faire une prise de sang sans difficulté. Un robin est venu assister à moins de 30cms de nous au changement d’émetteur, ce qui n’a pas perturbé Kuïa. La petite bosse sur son dos, remarquée l’an passé, est toujours là mais semble avoir diminué et n’a pas l’air de la gêner. Lorsque nous l’avons relâchée, elle a couru le long d’une souche avant de trottiner lentement vers le sommet, disparaissant dans le sol épais et moussu.

Merci Bronnie pour toutes ces précieuses informations.

Comme toujours, merci pour votre soutien et votre fidélité.
Kind regards, Bronnie

Kuia durant son bilan santé annuel [photo : ranger Jake Osborne]

The unnatural history of the Kakapo (réalisé par Scott Mouat)

 

Le CODA renouvèle son amour pour le Kakapo

Syrinx n°7 – Juillet 2018

Surprise ce matin en ouvrant la boite aux lettres, Kuia est arrivée.

Enfermée dans son carton elle a patienté une éternité puisqu’elle a fait le voyage depuis la Nouvelle Zélande (en soute, comme un vulgaire clandestin) jusqu’à nous, soit un trip de 18 739,812 kms.

Ni trou d’aération, ni eau, ni nourriture. Les Néo-Zélandais ont une drôle d’idée du bien-être animal !

Premier bol d’air français pour Kuia

Heureusement il en faut plus pour que Kuia y laisse des plumes. D’abord parce-que contre toute attente Kuia ne porte pas de plumes mais une fourrure en polyester. Comment est-ce possible ?

Nous vous laissons le soin de découvrir ce mystère sur la photo ci-contre.

C’est donc une bonne nouvelle : Kuia, du moins son double en peluche, sera parmi nous lors de notre exposition d’automne.

Elle sera le lot principal de notre tombola !

Le Certificat de ré-adoption (2018)

Notre club, il y a 4 ans a adopté un Kakapo. Ce témoignage d’affection, annuellement renouvelé, entre dans le cadre de notre volonté de maintenir une bio-diversité riche également en dehors des volières. Car c’est seulement en conjuguant les activités d’élevage (ex-situ) et les activités de protection (in-situ) que l’on peut garantir une préservation optimale des espèces, qu’elles soient menacées ou qu’elle ne le soient pas.

L’adoption de Kuia se concrétise par un don monétaire auprès du Kakapo Recovery, le seul organisme officiel de protection et de repeuplement de l’espèce, en Nouvelle Zélande. Notre adoption a contribué à obtenir les premières naissances qui pourraient être la clé de la survie du Strigops habroptila (le nom scientifique de ce perroquet).

Des nouvelles de Kuia

J’ai interviewé brièvement Bronwyn Jeynes, Ranger du département de Conservation.

Bonjour, je représente le CODA. Notre association a adopté Kuia depuis 4 ans. Le 29 septembre nous organisons notre exposition annuelle. Comme chaque année nous allons présenter le Kakapo et votre organisme aux visiteurs, dans le but de rassembler des fonds qui permettront de reconduire l’adoption. Nous savons que cette année est cruciale pour la survie du Kakapo car pour la 2ème fois Kuia est en voie de se reproduire. Il y a 2 ans elle a eu 4 petits, nos lecteurs souhaiteraient savoir comment ils se portent.

Bonjour Denis, comme vous avez pu le constater, Kuia a eu une fantastique année de reproduction en 2016, doublement excitante car ce fut sa première fois ! Au total elle a fait deux couvées, de 3 œufs chacune et tous fertiles ! Malheureusement son premier nid étant trop près de l’océan, elle a été dérangée par des insectes parasites et a finalement cassé 2 œufs. Les quatre autres oisillons ont survécu, il y a un mâle et 3 femelles. Kuia a été assistée par d’autres femelles pour la croissance des 4 jeunes.

Kuia Couve dans son nouveau nid (2016)

Si j’ai bien compris les prochaines années cruciales pour la survie des Kakapos seront dans 4 ans (quand le jeune mâle sera en âge de se reproduire), et 8 ans pour les jeunes femelles. C’est vraiment excitant. Comme ces oisillons sont d’une importance capitale pour l’avenir de l’espèce, allez-vous les lâcher dans la nature ou les conserver en sécurité ?

Tous les Kakapos vivent dans des îles au large, protégées et sans prédateurs, où ils sont maintenus par des membres de l’équipe. Il n’y a aucun Kakapo en captivité. Nous avons découvert qu’ils se comportaient mieux à l’état sauvage. Nous allons probablement transférer le jeune mâle dans une île différente pour éviter la consanguinité et pour disséminer le fabuleux capital génétique de Kuia, mais seulement quand il arrivera à maturité. Techniquement oui les prochaines années cruciales sont dans 4 et 8 ans, dans le meilleur des cas. Beaucoup de facteurs entrent dans le processus de reproduction. Ces années seront-elles des années à “Rimu” (le Rimu est une plante à fructification biennale) ? En outre et pour cette raison cette année 2018 est une année décisive puisque toutes les conditions sont là pour que Kuia transforme l’essai, mais nous misons aussi sur ses 2 frères, Sinbad et Gulliver, qui pourraient à leur tour obtenir une descendance.

Merci beaucoup pour toutes ces précisions. Nous continuerons à suivre les aventures de Kuia et de ses amis et à promouvoir le Kakapo en France.

Retrouvez Kuia et les Kakapos lors de notre prochaine exposition les 29 et 30 septembre à Portes les Valence.

Club Ornithologique Drôme-Ardèche